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6 juin 2017 2 06 /06 /juin /2017 21:54

Il y a quelques jours, j'avais publié une chronique sur le prestige qu'aurait pu tirer le nouveau président annoncer un ou des moratoires. Ça y est c'est fait: le prelèvement à la source vient d'être repoussé au 1er janvier 2019. Encore un peu de patience et nous en connaîtrons d'autres!

"Pour faire chic, Monsieur le Président vite un moratoire et si c'est dans le Social, c'est encore mieux!

Tout chef d'État se doit s'imposer un moratoire, ça fait partie de l'indispensable standing de la monarchie républicaine.

Arrêter un chantier pour apaiser momentanément l'opinion publique remontée contre, c'est aussi classe et classique que l'exercice du droit de grâce prévu par notre constitution pourtant républicaine quoique certains puissent prétendre le contraire. Dans un certain nombre de cas, le moratoire est une méthode infaillible pour enterrer  définitivement un projet, notamment à fins d'économies substantielles.

- François Mitterrand dans la lignée de Valéry Giscard d'Estaing en 1974, bien que converti à la bombe A et H, imposa un moratoire sur les essais nucleaires en 1992. Il satisfaisait ainsi les verts qui avaient recueilli sous la houlette de Daniel Cohn- Bendit près de 14% des suffrages  aux régionales. Son  successeur se dépécha dés 1995 de le rapporter au nom du maintien de la dissuasion nucléaire, à la grande satisfaction des polynésiens de Muroroa ravis de récupérer quelques bequerels dans leurs organismes.

- Jacques Chirac lui- même voulut sans trop de succès,  mettre en place au sein de la communauté internationale, un moratoire sur la peine de mort. Il ne fut guère entendu par les autorités chinoises qui ont inventé le principe des exécutions payantes pour les  familles des condamnés, pas plus que par les tribunaux américains grands amateurs de l'injection létale, ni par les cours de justice iraniennes qui préfèrent la pendaison si possible en public ou par les juges saoudiens adeptes de la décapitation. A défaut de réussite dans cette entreprise, notre Président si près du cul des vaches,  par cette initiative humanitaire, gagna pour pas cher, une réputation de grand humaniste. S'occuper ainsi de la peine de mort pour les autres tout en maintenant la bombe nucléaire potentiellement très mortifère, il fallait y penser.

- En pleine cohabitation, Lionel Jospin qui n'avait pas cru devoir pérenniser le moratoire sur la fermeture des services publics en milieu rural en 1998, se résolut sous la pression de l'opinion publique affolée par la crise de la vache folle, à imposer un moratoire sur l'autorisation des farines animales. Le prion s'était invité à la table des politiques plus que la question de la désertification des campagnes. C'est ainsi.

- Nicolas Sarkozy malgré les conseils attristés de l'INRA, crut bon sous la pression des écolos de maintenir la suspension par l'État de la culture expérimentale du maïs OGM contre l'arrêt  du Conseil d'État qui avait rapporté la mesure d'interdiction. . Les faucheurs volontaires avaient encore  frappé. Au nom de son alliance avec "les verts à l'exterieur et rouges à l'intérieur, comme les paztèques" son  successeur François Hollande se dépécha de prolonger la mesure de suspension de la culture de maïs transgénique, achevant par cette prolongation, de décourager la recherche française en matière de biologie à usage de l'agriculture. 

-Pour ne pas être injuste, celui qui n'a pas eu le courage de se représenter à la présidentielle en 2017, s'engagea fermement pour mettre en place un moratoire sur l'exploitation des gaz de schistes. On aurait apprécié qu'il en fasse de même pour limiter la multiplication des éoliennes qui saccagent les plus beaux paysages d'une France qui constitue une des premières destinations touristiques au monde, mais celles-ci développant  des énergies renouvelables, elles sont considérées comme des vaches sacrées intouchables. Alors pas touche!

Bref, il n'y a pas mieux qu'un moratoire pour asseoir l'autorité présidentielle.

- La meilleure preuve en est, c'est qu'évidemment pendant la campagne électorale de la présidentielle et même les primaires, l'idée de moratoire a été   utilisée à plusieurs reprises par les candidats: celui de Yannick Jadot pour stopper  une fois encore le projet d'aéroport de Notre Dame des Landes, celui de Marine Le pen qui souhaitait suspendre pendant un temps toute immigration légale, celui encore de Benoît Hamon, prêt à demander à ses partenaires européens (toujours tirés compréhensifs) un report de remboursement de nos dettes publiques qui ont dépassé en 2017 la coquette somme de 2200 mds d'Euros.  

-  Le président fraîchement élu, maintenant qu'il est aux manettes, peut donc désormais se livrer à cet exercice séduisant du moratoire avec  cet  avantage non négligeable qu'il est plus facile d'arrêter une politique que de la mettre en oeuvre..

Quelques uns d'entre eux pourraient être décidés en arguant de de nobles raisons: 
le chantier de la retenue à la source de l'impôt à la source pourrait  être reporté pour éviter un plantage assuré des Finances publiques tant ce projet est conduit  dans la précipitation.
L'arrêt de toute nouvelle construction de lignes TGV  pour que soit réexaminée leur profitabilité financière, serait apprécié d'autant plus qu'il est fait oblication à la SNCF de se réorienter vers les trains du quotidien.
La suspension provisoire des financements d'État pour que soit redimensionné à la baisse le chantier olympique de 2024 à Paris. Certes une telle décision mécontenterait certainement beaucoup Mme Hidalgo qui n'a pas ménagé ses vacheries vis à vis du candidat Macron pendant la campagne électorale , mais elle rassurerait les provinces inquiètes de voir les crédits d'équipements s'orienter vers l'île de France pour une manifestation festive de trois semaines. Pour de simples Jeux certes planétaires, c'est un peu dommage d'oublier le nécessaire aménagement du territoire en se focalisant sur la capitale.

- Mais c'est dans le domaine social où se présentent de belles opportunités de moratoire: 

D'ores et déjà le premier ministre semble avoir mis en oeuvre une réflexion sur un moratoire relatif au compte pénibilité assorti de maigres avantages   retraites. Tant de complication dans sa mise en oeuvre pour  si peu. Une telle décision déjà presque annoncée par le président de la République serait prise à  la grande satisfaction des organismes patronaux qui dénoncent  le caractère "usinagazesque" d'une tell dispositif qui n'a pas son pareil en Europe. 

   
 Il pourrait aussi décider de suspendre l'application de l'article 83 de la loi du 26 janvier 2016 relative à la modernisation de notre système de santé et qui concerne plus spécialement la mise en oeuvre du tiers payant qui irrite les professions médicales. 
Applicable en principe depuis le 1er janvier 2017 pour les seuls remboursements prévus par l'assurance maladie puisque le conseil constitutionnel n'a pas accepté que le texte concerne obligatoirement  les remboursement des complémentaires santé, la mesure fait l'objet d'une application très incomplète selon les praticiens, de sorte que certains commentateurs parlent d'un " véritable foutoir,".  Cette critiques n'est pas très indulgente pour les promoteurs de la réforme qui rétorqueront avec quelque raison que pour un tel dispositif plébiscité par les patients, il faut laisser du temps au temps.

Pour éviter un mouvement d'indiscipline croissant de la part d'une partie des médecins conventionnés, il serait souhaitable que le dispositif soit reexaminé avec comme idée directrice qu'il n'est peut-être pas forcément utile de généraliser une telle mesure pour des assurés et ils sont nombreux, qui ont les moyens de payer leur consultation.

En ce sens le président Macron devrait annoncer un moratoire plus général  dans la mise sous assistance par l'Etat et la Sécurité Sociale de l'ensemble de la population qui a tourné à l'obsession chez nos dirigeants du quinquennat précédent,

Dernière proposition  plus subversive  puisque notre Président  veut assouplir davantage la réglementation du travail pour faciliter la création d'emploi, il serait peut-être prudent de décréter au préalable, un moratoire sur le droit de grève qui rappelons le, selon le préambule de la constitution de 1948 encore applicable,   s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent, ce qui signifie que ce droit peut être limité.  
"Pour démanteler le code du travail", qui serait une intention du chef de l'Etat, comme le prétendent Mr Martinez et Mr Mélenchon, un tel moratoire serait bien utile afin d'éviter le désordre dans les entreprises et les administrations.

Mais des esprits chagrins assurent  que  ce ne serait pas constitutionnel et  pas très démocratique .

Allons bon pour décréter certains moratoires, il faut donc réformer la Constitution. On n'est pas sorti de l'auberge s'il faut demander son avis au Congrès ou au peuple! (30 mai 2017)"

 

Frédéric Buffin le 6 juin 2017.

 

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